• Et voici que nous sommes en la fête de Pentecôte: l'Esprit Saint est donné aux disciples réunis, à Jérusalem, cinquante jours après l'événement de la résurrection du Christ. Au Cénacle, surprise ! se manifeste là comme un Souffle vigoureux (Actes des Apôtres 2,1-11). C'est une matinée de plein Vent, de Vent nouveau. Ce grand Souffle, c'est Celui dont nous avons bien besoin en cette crise multiple: sanitaire, sociale, économique, et spirituelle.
          Ce Souffle de Pentecôte est celui de l'Esprit Saint que Jésus nous offre à chacun et à nos communautés. Comme il souffle sur les disciples avec tant d'amour, Jésus nous dit, tout simplement mais avec entrain et joie: "Recevez l'Esprit Saint ! " (Jean 20, 19-23).
           Par le prophète Isaïe (63,10-11), le Souffle de Dieu est "déjà appelé Esprit Saint". Son Nom est en deux mots bien sentis, bien pleins, bien rayonnants. Or, souvent, on abrège son Nom en un seul mot "Esprit", tout court. Nous savons la longue Histoire de l'Esprit Saint dans le Premier Testament: il s'agit d'abord de l'esprit de Dieu, de Dieu en tant qu'être spirituel, invisible, au-delà de nos sens physiques. Selon la Genèse: "Au commencement, le souffle de Dieu planait sur les eaux.." (Gn 1,2). Puis la présence de l'Esprit est mieux perçue: l' "Esprit de Dieu" est promis à tout le peuple (Ezéchiel 39,29). Ensuite, la foi en l'Esprit Saint s'approfondit encore: la personne même de l'Esprit Saint va être mieux reconnue, invoquée, célébrée. A travers les images du vent, de l'eau, du feu, le Premier et le Nouveau Testaments nous retracent ainsi la progressive et joyeuse découverte de l'Esprit Saint avec toute sa personnalité propre, sa Force, sa Lumière, son rayonnement.
             Quand le mot "Esprit" est prononcé tout seul, sans l'expression totale "Esprit Saint", le risque est d'en rester au simple aspect "esprit", comme on parle de l'esprit humain, ou d'une orientation de pensée et de vie quotidienne: l'esprit de famille, l'esprit d'équipe, le bon esprit de l'ambiance d'un groupe..., ou encore l'esprit dont parlent beaucoup de spiritualités contemporaines soucieuses, à juste titre, de l'épanouissement de l'être humain en sa totalité: corps, âme, et esprit. Des philosophes de l'esprit humain ont réfléchi sur l'esprit comme pleine manifestation de soi, jusqu'à l' "esprit absolu" et même jusqu'à l' "Esprit" (avec majuscule).
             Pour un disciple du Christ, l'expression qui nomme explicitement l'"Esprit Saint" reconnaît avec grande joie le don le meilleur du Père. Quelle joie, en faisant le signe de la Croix de conclure par l'Esprit Saint: "Au Nom du Père, et du Fils et du Saint Esprit !". C'est une joyeuse exclamation !  Et cette parole engage encore beaucoup plus de portée, d'énergie, de dynamisme divin. En même temps que nous disons la parole du signe de la Croix, le Christ nous dit à nouveau: "Recevez l'Esprit Saint !... pour en vivre... dans toute votre vie, avec vos vos joies ou vos peines ! "
           Avec le grand psaume de la pénitence, le Ps. 50-51, comme chaque vendredi matin à l'Office des Laudes, les priants, par trois fois, implorent le Seigneur en crescendo. D'abord "Ô mon Dieu, raffermis au fond de moi mon esprit.". Puis: "Ne me reprends pas ton esprit saint.". Ensuite: "Rends-moi la joie d'être sauvé. Que l'esprit généreux me soutienne.". Or, en ces invocations ferventes, "esprit", et surtout "esprit saint" méritent bien une magnifique et grande majuscule, celle de la fête de Pentecôte: l'Esprit Saint.  "Ô mon Dieu, raffermis mon Esprit ! ", cet Esprit Saint reçu en moi à ma naissance, à mon baptême, à la confirmation. Puis: "Ne me reprends pas ton Esprit Saint ! ", ton Esprit Saint de Pentecôte sans lequel ma vie fléchit.. car Il est donateur de vie robuste. Ensuite: "Que l'Esprit (Saint) généreux me soutienne !" De fait, qui est plus généreux que l'Esprit Saint ? Bref, de quoi pouvoir, à la fin de ce chef d'oeuvre des psaumes, couronner la prière par une belle louange trinitaire "Gloire au Père, et au Fils et au Saint Esprit !" En principe, nos frères orthodoxes ne manquent pas de mettre la majuscule dans ce Psaume 50. Et le théologien Yves Congar a pu estimer qu'un des apports majeurs du Concile Vatican II a été de mettre en valeur la Personne même de l'Esprit Saint et sa mission, et la prière permanente du Christ au Père d'envoyer son Esprit Saint sur le monde, sur l'Eglise. A l'Eucharistie, c'est la prière au Père d'envoyer l'Esprit Saint sur les dons - sur le pain et le vin - pour qu'ils soient consacrés en Corps et Sang du Christ, et que le Père envoie sont Esprit Saint sur toute l'assemblée (la prière de l'épiclèse).
            Avec l'Esprit Saint de Pentecôte, c'est l'Alleluia de Pâques qui rayonne dans le Souffle de Vie et d'Amour du Père sur les disciples. C'est la forte expression de l'Esprit Saint, du Dieu qui se révèle comme plénitude d'Amour, de Lumière, et de Force.


    P. Pierre Fournier.






  • Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique