• Méditation pour ce 14° Dimanche du Temps Ordinaire

    Méditation du dimanche 5 Juillet 2020

    Mt.11/25-30  « Prenez mon joug »

     

    « Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur ». Voilà bien un discours qui détonne face aux tyrans de ce monde, face aux ambitieux et aux orgueilleux qui peuplent les bancs de nos assemblées représentatives… « Je suis doux et humble de cœur » : qui peut le dire parmi les dirigeants de ce monde ? Et dans l’Eglise combien répondent à ce critère ?... Voyez en Israël : qui s’est opposé au Christ et à son enseignement ? Non pas les petits, mais les soi-disant « sages » - à leurs propres yeux - et surtout les habiles, toujours prêts à tronquer la vérité pour le mensonge. « Je hais les double-cœurs », dit Yahvé (Ps.118/113). Ils peuplaient la maison de Dieu et sont allés jusqu’à condamner le Juste.

     

    Le Seigneur est clairvoyant, il sait, parmi la foule qui l’entoure, ceux qui boivent ses paroles et ceux qui refusent d’y goûter. Aussi rend-il grâce au Père pour ces « petits », allaités au Verbe de Vérité et qui pourront grandir dans la connaissance de Dieu. Nous sommes toujours dans le thème de l’accueil et du refus (voir dimanche dernier). « Tu as caché ces choses aux sages et aux habiles » : ils sont dans l’autosuffisance et le refus systématique… Comment Dieu pourrait-il leur révéler quoi que ce soit ?

     

    Quelle est donc cette confidence qu’il veut faire aux « petits », et au nom de quelle autorité, si ce n’est pas celle du Sanhédrin ? Une confidence, dit-il, qui n’est pas la sienne mais celle de son Père. Le voici qui affirme ici son lien très fort avec la Divinité : de quoi surprendre ! Et il fait fort : « Nul ne connaît le Père sinon le Fils, comme nul ne connaît le Fils sinon le Père ». Et encore : « Le Père est en moi, et moi dans le Père… Le Père et moi nous sommes un… ». Les détracteurs vont bondir ! Mais c’est sa seule légitimité devant les hommes, attestée par ses nombreux miracles. Si donc il connaît le Père comme nul autre, lui seul peut le révéler au monde - à ceux du moins qui veulent bien l’entendre. Le révéler, pour l’offrir un partage : voilà son seul désir. Il n’a aucun intérêt propre en cette affaire, tout au contraire ! mais il veut que l’on connaisse le nom du PERE. Ah certes, ce ne sont pas ceux qui se revendiquent de la chair qui pourront entendre cet appel, mais ceux qui, par l’Esprit, font taire les œuvres de la chair, pour vivre selon Dieu - comme saint Paul nous y engage en ce jour (2ème lecture).

     

    Autre comportement, autre perspective…

     

    « Prenez sur vous mon joug »… ce joug si doux, ce fardeau si léger. C’était un petit âne, un ânon nous dit le texte, qui portait le Seigneur au Jour des Rameaux. Etait-il doux à son dos ce « joug » ? Il faut croire, car il a bien rempli son office… Porter le Seigneur, dans nos cœurs d’abord, dans nos esprits bien sûr, sur nos épaules enfin… Porter son témoignage, le faire nôtre, le donner, au risque de la contradiction : telle est la mission du chrétien. Oui, il est doux ce joug qui nous réconcilie avec le Père, qui nous fait fils avec le Fils. C’est Satan qui enchaîne, c’est lui qui ploie l’humanité sous le joug de la souffrance et de la mort. Le Christ fait exactement l’inverse : ce joug, il le charge sur ses propres épaules et il le cloue à la croix. Il le supprime. Une mystique qui demandait au Christ quelle avait été sa plus grande douleur physique : « Celle de mon épaule, a-t-il répondu, déchirée par la Croix lorsque je la portais ». 

     

    Oui il est léger le joug du Christ pour qui s’attache à lui ! On peut se demander  pourquoi il emploie ce terme de « joug »… tout l’opposé de ce qu’il fit pour nous ! Son Nom « Jésus » exprime la délivrance et la suavité, comme le chante cette abbesse du Moyen-Age dans une hymne retenue pour la fête du Saint Nom de Jésus : « Qu’il est bon de se souvenir, ô Jésus de ton Nom qui réjouit nos cœurs, il est bon plus que miel et comble nos désirs, lorsque invoqué sur nous il marque ta présence. » Alors pourquoi ce terme ? Considérons ici l’extrême délicatesse du Seigneur qui n’ose offusquer notre liberté. Il ne s’impose pas, tout au contraire : au point de présenter son salut comme un « joug ». Il fallait oser !

     

    Oui, elle peut exulter la fille de Sion, pousser des cris de joie, car son Roi vient à elle, juste et victorieux (1ère lecture). Victorieux du péché et de la mort. « Eve a pleuré, Marie a exulté, s’écrie saint Bernard, Eve a porté les larmes, Marie la joie dans ses entrailles ! » Bientôt il brisera l’arc et la guerre, et il proposera la paix aux nations. « Et la mort, ennemie dernière, sera réduite à rien » conclut saint Paul. (1 Cor.15/26). Le verrons-nous ce temps de réconciliation entre Dieu et les hommes, ce « siècle » de pleine libération ? Car il souffre notre monde. Il n’a pas pris sur lui le joug si doux du Christ.

     

    Faisons-le pour lui.

    Marie-Pierre